Beaucoup d’athlètes de haut niveau ont déjà entendu parler de la zone, certains l’ont déjà traversée ici et là dans leur carrière.

Qu’est-ce que la zone? Un état où tout coule de source, dans lequel le temps semble s’abolir, on est totalement centré sur ce que l’on fait, absorbé. Les sportifs de haut niveau sont en quête de cet état dans lequel on joue son meilleur.
Mais la zone a ses limites et ses croyances qui peuvent aller à l’encontre de ce que recherchent les athlètes. Ils courent après un concept impalpable comme s’ils voulaient capturer l’air dans leur main.

La zone de « monsieur tout le monde » :

Prenons un père de famille bricolant dans son garage un dimanche après-midi. Tout accaparé à sa tache, il sifflote et répare un meuble. Il démonte, visse, cloue, passe d’un établi à un autre. Il s’est mis dans son garage à 14h et voilà que son épouse l’appelle pour préparer le repas. Il est 18h30. En un clin d’oeil le temps est passé. Il n’a pas encore fini mais regarde toute l’avancée de son travail. Il est plutôt surpris de son travail, content de lui-même et se promet de finir dimanche prochain.

Cet homme a traversé une après-midi dans la zone. N’allez pas croire qu’il n’a pas été distrait par quelque pensée parasite : les échéances dans son boulot, la visite chez le médecin pour la petite, les vacances à organiser etc. Son esprit a parfois vagabondé dans le passé et le futur mais il était dans un état d’esprit général de ‘flow’ où tout allait de soi, il suivait machinalement ce qu’il avait à faire et revenait dans l’instant présent.
Cet état peut se retrouver dans n’importe quel domaine: sport, musique, étude, course à pied, marche, littérature, travail. Les recherches en psychologie positive ont montré que cet état est source de bien être voire de bonheur. Il est aussi source de performance au plus haut niveau.

La zone et la performance :

Les sportifs recherchent cet état où les choses paraissent aller de soi sans pour autant y parvenir ( les musiciens, les chefs d’entreprise, les étudiants également). Qu’est-ce qui bloque ?

L’état de zone peut être atteint sur demande. Pier Gauthier (auteur du livre, La force du Mental, méthode ACCEDER) et moi-même préparons des athlètes de haut niveau afin qu’ils entrent le plus souvent possible dans cet état propice à la performance. Cependant nous entendons des choses diverses et variées qui sont en totale contradiction avec l’état de zone.

Être dans l’état de zone signifie entre autre être à ce qui est, dans le moment présent, absorbé par ce que l’on fait. Dans l’exemple du bricoleur du dimanche, le père de famille sifflotait et travaillait dans un flow régulier tout accaparé à sa tâche.
Le bricoleur est totalement relâché. Aucun danger, aucune pression dans son garage un dimanche : le flow est donc dans la relaxation.

J’entends des entraineurs dire à leur joueurs « joue comme si tu étais dans ton jardin, comme un enfant, totalement relâché ».
Ce serait bien si cela marchait comme cela mais ça n’est pas le cas.

La zone sous pression :

Imaginez-vous marcher dans la savane et sur votre chemin un lion apparaît. Il vous remarque et rugit, faisant preuve de sa volonté de vous dévorer! Dans ce genre de moment entrer dans la zone serait bienvenue. Pensez-vous que vous vous diriez « cours comme quand tu le faisais dans le jardin d’enfant et que ta maman t’appelait pour goûter »? C’est peu probable. Plus probable est qu’assailli par une peur violente vous preniez vos jambes à votre cou, grimpiez sur le premier arbre vous mettre à l’abri. Voyez ce moment de peur effroyable ressentie devant le lion, votre départ en sprint dans la direction opposée, votre ascension en haut de l’arbre (vous ne savez même pas comment mais vous avez fait): c’est ça la zone!
Tout accaparé à ce que vous faites, dans le moment présent.

Dans le cas de la savane, la zone est aisée à atteindre car il y est question de survie, d’instinct. Dans la vie de tous les jours, quand on a un hobby quel qu’il soit il est aussi aisé d’atteindre cet état car il n’y a pas d’enjeux ou de pression. D’ailleurs beaucoup de gens passionnés l’atteignent aisément et régulièrement. Soit la survie, soit aucune pression. Problème en sport de compétition, nous sommes dans un entre-deux.

La spécificité de la compétition :

Quand il y a compétition, enjeu, pression, il parait plus difficile d’atteindre la zone. Il n’y est point question de vie ou de mort et on n’est pas vraiment libre dans la pratique comme notre bricoleur du dimanche. C’est un entre deux particulier. Prenez un joueur de tennis qui pratique son sport à haut niveau. Il participe à une compétition importante et voudrait vraiment bien y figurer. Il se met donc de la pression ( et c’est normal, c’est l’envie de bien faire), mais cette pression l’inhibe et il ne trouve pas cet état qui l’a d’abord amené à pratiquer le tennis quand justement enfant ce n’était qu’un jeu. Il ne donne pas le meilleur de lui même.

Que faire?

L’erreur faite par la plupart des sportifs est de se dire : ok, je suis compétiteur, j’ai envie de gagner, pour gagner il faut jouer mon meilleur, et mon meilleur est quand je suis relâché, comme quand j’étais enfant ou comme à l’entrainement. Ils recherchent alors cet état de grâce, de flow, ils essaient d’entrer dans la zone mais par la mauvaise porte. Cette porte est fermée. D’où frustration et incompréhension. Certains l’atteignent au bout de l’effort quand ils n’ont plus aucune attente (comme le bricoleur dans le garage).

Résumons,

Un lion arrive sur vous : vous courez dans la peur .
Vous bricolez dans votre garage : vous sifflotez détendu.

Ces deux derniers sont des exemples de zones dans des contextes diamétralement opposés.

Comme nous l’avons dit plus haut, la compétition se situe dans un entre-deux.
En compétition, acceptez les peurs, la pression, la colère et donnez le meilleur. Pas de jardin d’enfant, vous êtes dans l’arène : embrassez le moment présent, centrez vous sur ce que vous avez à faire ici et maintenant.
Paradoxalement le relâchement vient en acceptant la pression et le stress du moment. C’est pour cela que des champions parlent d’avoir atteint l’état de zone dans les moments les plus critiques de leur carrière.

Zidane et sa Panenka en finale de coupe du monde.

Il est incroyable de tenter un geste pareil : un petit lob sans force sur un tir au but face au meilleur gardien du monde en finale de coupe du monde ! Vous imaginez la pression? De plus Zinedine Zidane jouait son dernier match!
Zidane est de la trempe des grands champions. Fort est à parier qu’il était dans la zone à ce moment précis. Zidane savait que Buffon le connaissait par coeur. Ils ont joué ensemble pendant des années. Et ce n’est pas pour amuser la galerie que Zidane a choisi de tirer une Panenka. Sous la pression et l’enjeu lui est apparut cette solution géniale.
Une Panenka, génial. Oui génial… et dans la zone. Totalement centré sur le moment, prenant la situation dans sa totalité : la pression, la peur, l’angoisse, la volonté de réussir, les points forts, les points faibles etc..
Le geste est passé de justesse, mais il aurait pu rater.

Entrer dans la zone n’est pas synonyme de victoire :

C’est aussi une clé qui bloque les sportifs. La plupart pense qu’entrer dans la zone = victoire. Rien n’est plus faux. Entrer dans la zone signifie être totalement centré sur le moment et l’activité. Cela donne donc de très bons résultats mais ne garantit en rien victoire ou défaite. Quand on entre dans une arène il faut bien garder en tête que la défaite fait tout autant partie du cadre que la victoire.
Le joyeux bricoleur sifflotant dans son garage n’a pas à prendre cela en considération. C’est pour cette raison qu’il est plus aisé d’entrer dans la zone car l’enjeu est géré.
Accepter la pression, la peur de perdre, tout autant que la volonté de gagner, l’envie de bien faire sont conditions sine qua non pour entrer dans la zone.

Chercher à se sentir dans un jardin d’enfant quand nous sommes dans une arène entourés de lions est une erreur fondamentale qui nous éloigne de la zone.
Si vous êtes des sportifs en compétition, embrassez le fait qu’une fois dans l’arène, il est normal d’avoir peur et d’être stressé prenez ça à bras le corps et donnez le meilleur de vous même dans le moment présent.

Les 7 clés de la zone avec la méthode A.C.C.E.D.E.R :

Faire face au stress (gestion des émotions), embrasser le moment présent (concentration) sont deux facteurs déterminants pour entrer dans la zone.
Ce ne sont pas les seuls. La méthode A.C.C.E.D.E.R travaille sur 7 facteurs :

  • Un objectif clair et précis ; une motivation forte
  • Gérer ses émotions
  • Avoir confiance en soi
  • Savoir se concentrer
  • L’acceptation de l’erreur, de la défaite, l’adaptabilité
  • L’environnement
  • Ressources et responsabilité

C’est comme cela que vous entrerez dans la zone, ou plutôt devrais-je dire que la zone vous prendra. Cela se travaille. Certaines personnes auront plus besoin de travailler sur la confiance, d’autres sur la concentration, d’autres encore sur plusieurs aspects.
Le tout est de comprendre que pour entrer dans la zone, les 7 facteurs doivent être réunis. Comme une porte qui comporterait 7 verrous. Si un verrou venait à être fermé, l’accès à la zone en serait bloqué.

La zone ne se capture pas une fois pour toute :

Si vous « cherchez » la zone, elle vous fuira. C’est un paradoxe, mais c’est comme ça. J’aime citer l’idée phare du Manuel d’Epictète à mes athlètes pour qu’ils trouvent cet état particulier dans lequel on fait juste ce qu’on a à faire :

«  Parmi les choses qui existent, certaines dépendent de nous, d’autres non. »

Ce qui dépend de nous : se concentrer sur l’ici et le maintenant, donner le meilleur de soi-même, jouer ses points forts, gérer ses émotions, avoir confiance, persévérer, garder une motivation forte, s’adapter.
Ne dépend pas de nous : la victoire, la défaite, les honneurs.

J’espère que cette article vous aidera.

José Doutre
www.coachingmental.fr

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